L'exercice habituel du pouvoir
Par David Monniaux le dimanche, mars 31 2013, 09:27 - Société - Lien permanent
Des gouvernements de droite se sont succédé en France entre 2002 et 2012. À plusieurs reprises, ils ont pris des décisions ou fait adopter des lois qui ont mécontenté une partie de la population — ce qui en soit n'est pas critiquable, vu qu'il n'y a pas de décision politique qui ne mécontente personne. Parfois, cette partie était importante, et parfois il y a eu des manifestations. Mais, comme le rappelait en 2003 le premier ministre Jean-Pierre Raffarin, la « rue » ne gouverne pas : un gouvernement élu sur un programme peut l'appliquer sans devoir céder aux protestations des mécontents. Et, bien entendu, on sortait CRS et gendarmes mobiles, parfois équipés comme de véritables « Robocop ».
Lors de ces dix années, on a souvent usé de procédures permettant de raccourcir les débats parlementaires : déclaration d'urgence (remplacée par la « procédure accélérée ») : selon un rapport de 2012 du sénateur David Assouline, sous la XIIIe législature (2007-2012) ont été promulguées 202 lois, dont 47 adoptées par procédure accélérée. Bien entendu, il est possible qu'il se soit souvent agi de textes techniques et n'appelant pas de grands débats ; mais on a adopté par ce moyens des textes contestés comme la loi DADVSI. On peut également s'interroger sur l'urgence qu'il y avait pour le Gouvernement à faire adopter des textes dont seulement une moitié sont pleinement applicables... parce qu'il n'a pas produit les textes réglementaires d'application nécessaires. Encore s'agissait-il de procédures parlementaires ; mais MM. Raffarin et Villepin ont utilisé par 3 fois l'article 49-3 de la Constitution, qui permet de faire adopter immédiatement un texte en engageant sur celui-ci la responsabilité du Gouvernement (responsabilité toute théorique, la dernière motion de censure adoptée remontant à 1962 — aucune majorité parlementaire n'a envie de renverser un gouvernement qui en est issu, quand bien même celui-ci serait impopulaire et maladroit).
Lorsqu'il s'est agi de consulter la population, on lui a certes soumis par référendum le traité constitutionnel européen, mais, les électeurs souverains ayant « mal voté », on a par la suite adopté le traité de Lisbonne par voie parlementaire. Notons que tous les grands médias français étaient favorables à ce traité. Quant aux médias internationaux, notamment anglophones, ils n'hésitent pas à fustiger l'archaïsme, l'immobilisme des français, de leurs syndicats, de leur monde universitaire. Il faut dire qu'ils ont tendance à prendre en france l'opinion d'éditorialistes et de politiciens qui, justement, soutiennent l'idée que le Parti Socialiste est bien trop de gauche.
Enfin, certains responsables politiques ne se sont pas privés d'insulter la population qui, ne votant par pour eux, ne les intéressait pas. Je pense ici notamment au président Nicolas Sarkozy : quelle bravoure à crier « casse-toi, pauvre con » à un simple citoyen, quand on est protégé par des haies de policiers... et ensuite à poursuivre un autre simple citoyen pour « offense au chef de l'État » pour avoir tout simplement repris cette interjection ! Et ne parlons pas de son dédain pour des professions entières : je n'oublie pas son discours du 22 janvier 2009, où il expliquait que les chercheurs français étaient, en somme, des médiocres et que ceux qui ne seraient pas d'accord avec lui étaient là juste parce que « il y a de la lumière, c'est chauffé ». Au delà des idées, c'était une manière de s'exprimer, et même une manière d'agir, qui seyait plus à un « petit chef » qu'à un chef d'état. Louis de Funès était, certes, comique, mais dans des œuvres de fiction !
Autant dire que pour la plupart des citoyens se réclamant de la « gauche », ces dix années ont dû sembler un long tunnel : gouvernement qui leur dit, en somme, qu'ils sont minoritaires et que leur opinion ne compte donc pas ; accusations permanentes d'archaïsme par une bonne partie des médias ; manifestations qui n'aboutissent à rien (à l'exception notable du cas du « Contrat première embauche »)...
C'est donc avec un certain amusement que je constate le traumatisme que constitue, pour une partie de l'opinion française (notamment de droite), le fait d'être dans l'opposition. Je pense en particulier à ceux qui ont défilé lors de la « Manif pour Tous » de dimanche dernier — l'indignation est palpable dans les commentaires qui ont suivi.
Prenons, par exemple, ce commentaire d'une personne se disant journaliste, de droite et opposée à la réforme du mariage. Elle s'offusque de l'utilisation, par les forces de l'ordre, de gaz lacrymogènes contre les manifestants, au motif que ceux-ci n'étaient « des syndicalistes rompus au combat de rue ». Il me semble qu'il est implicite dans ce propos que lorsque les gaz lacrymogènes sont utilisés par les gouvernements de droite, ils ne touchent, en somme, que des « professionnels de la manifestation » et non de simples citoyens mécontents de l'action du gouvernement. Quelle curieuse vision de la société ! On pourra, par exemple, ce rapporter à cet événement où un commandant de gendarmerie a fait scandale par son usage de sa bombe à gaz lacrymogène... On voit clairement sur la vidéo que la manifestation comprenait des personnes âgées, des enfants, des élus ceints d'écharpes tricolores... et on voit le gendarme asperger de gaz lacrymogènes des gens quelconques — clairement pas des « black blocks » équipés pour la guérillas urbaine. Certains indiquent que les gendarmes s'étaient précédemment accrochés avec des militants d'extrême-gauche ; mais ce n'est pas a priori différent du cas de la « manif pour tous », où il y avait des militants d'extrême-droite prêts à en découdre.
Si je mets en exergue ce commentaire, c'est parce qu'il me semble qu'il exprime plus ou moins ouvertement certains traits de pensée qui, souvent, sont tus sous les conventions sociales ; poursuivons donc l'analyse par cette phrase :
« La vérité, c’est que la France a toujours été conservatrice, elle est dirigée en ce moment par une poignée de gens de gauche qui pensent la représenter avec des réformes comme celle-là, à tort. »
Ce propos fait écho à celui du ministre François Baroin, répétant que la gauche avait pris le pouvoir « par effraction » en 1997, ou à l'analyse d'Alain Minc expliquant doctement
« Le faible écart avec M. Hollande montre que la France n'est pas de gauche. Celle-ci ne peut gagner que par effraction »
Bref, la gauche est illégitime pour réformer, même quand elle a été élue au pouvoir, car elle n'est élue en quelque sorte que par hasard ou dépit. Relevons enfin cette phrase, à propos de la partie de la population opposée au « mariage pour tous » :
« La question c’est : est-elle majoritaire ou pas ? Moi je pense que oui. La France fille aînée de l’Eglise, ça s’efface pas d’un trait de plume. »
C'est une version plus soft du slogan des activistes qui ont interrompu un exposé d'Erwann Binet, rapporteur du projet de loi sur le mariage homosexuel : « nous sommes le peuple », sans doute par opposition aux « bobos ».
Il est amusant de constater à quel point ces arguments sont en miroir de ceux utilisés par les organisations de gauche pour s'opposer aux réformes des gouvernement de droite élus : on promet un « troisième tour social » après les élections, on dit représenter la majorité de la population (les travailleurs) face à la minorité privilégiée, on se réclame de la tradition du Front Populaire et du Conseil National de la Résistance (tradition, certes, moins longue que celle du catholicisme en France, par ailleurs célèbre pour son alliance avec la royauté).
Naguère, la « gauche » manifestait et annonçait des affluences deux fois supérieures à celles annoncées par la police, bien évidemment accusée de partialité au profit du gouvernement ; les syndicats déploraient qu'on les ignorât ou qu'on se moquât d'eux. Maintenant, les opposants au mariage homosexuel manifestent et annoncent des affluences quatre fois supérieures à celles annoncées par la police, là encore accusée de partialité ; ils déplorent qu'on ne les écoute pas, qu'on agisse avec désinvolture à l'égard des représentants des religions, qu'on ne les auditionne pas avec l'attention qu'on leur devrait.
On le voit, qu'elle soit de gauche ou de droite, l'opposition prétend représenter le vrai peuple. Cette revendication majoritaire s'accompagne de propos décrivant l'adversaire politique comme instrument de lobbys et de minorités agissantes — dans un cas, des banquiers et autres privilégiés, dans l'autre cas des homosexuels bobo, pour résumer un peu abruptement. Le cardinal-archevêque André Vingt-Trois a d'ailleurs bien insisté, dans son audition, sur le fait que le mariage homosexuel ne concerne qu'une « faible minorité ».
Bien entendu, l'échauffement des esprits mène parfois à des propos d'une vigueur excessive. Je lis ainsi que certains protestataires anti-Hollande prétendent que celui-ci mènerait une « lutte des classes » (contre les bourgeois, je suppose) ; j'ai du mal à concilier cela avec un gouvernement comprenant MM. Cahuzac et Fabius et dont la seule promesse qui pourrait évoquer une revanche anti-bourgeois est la fameuse imposition de 75 %, sans cesse repoussée. D'autres parlent d'un « printemps français » par allusion au « printemps arabe » ; faut-il rappeler que les révolutions du monde arabe avaient lieu contre des dictateurs faisant emprisonner, voire torturer, leurs opposants politiques, et accaparant les ressources publiques au profit de leur famille étendue ?
Finalement, ce que la droite dénonce, c'est non pas l'exercice du pouvoir par François Hollande et son gouvernement, mais l'exercice du pouvoir tel qu'habituellement pratiqué en France — dont, naturellement, on ne se plaint que lorsque l'on est dans l'opposition. François Mitterrand, dans l'opposition, avait dénoncé dans Le Coup d'état permanent la présidence quasi-monarchique de Charles de Gaulle — attitude qu'il a reprise une fois lui-même président. J'estime d'ailleurs que, de ce point de vue, François Hollande est d'une grande modération par rapport à son prédécesseur... Peut-être n'écoute-t-il pas ceux qui s'opposent à ses projets, mais au moins il ne les insulte pas.
Au delà des clivages partisans, la question fondamentale qui se pose est celle du blanc-seing que l'on accorde pour 5 ans à celui qui a réussi à se faire élire par une courte majorité des suffrages exprimés. Je désespère d'ailleurs de l'absence de véritable débat à ce sujet ! La gauche peut actuellement se gausser de voir la droite découvrir ce que cela veut dire que d'être dans l'opposition ; mais qu'en sera-t-il dans cinq ans ?
PS : Pour reprendre la terminologie féministe : les plaintes de la droite et des conservateurs au sujet du mariage homosexuel sont celles de privilégiés qui, soudainement, se trouvent privés de leur privilège et traités comme les autres par le pouvoir (c'est-à-dire avec indifférence et lacrymogènes si besoin).
Commentaires
Belle analyse. On est effectivement surpris de voir à quel point la symétrie comportements des personnes, selon qu'elles sont au pouvoir ou dans la rue est quasi-parfaite. (Cela dit, comme les politiques sont assez proches, ce n'est peut-être pas si surprenant.)
Pour le commentaire de personne journaliste que vous analysez, celle-ci ne se dit pas opposée à la réforme du mariage (ni pour), mais opposée au personnes qui le défendent en raison de leurs raisonnements expéditifs (si j'ai bien compris).
PS : Je crois que le dernier lien n'est pas correct
" crier « casse-toi, pauvre con » à un simple citoyen "
en réponse à un très sympathique :
" touche-moi pas, tu me salis "
@simple-touriste: La dignité de la fonction présidentielle implique une mesure de l'expression et un contrôle de soi que l'on ne saurait exiger d'un simple citoyen, surtout si celui-ci fait face à des difficultés.
Prenons quelques analogies :
- un professeur de lycée doit s'exprimer avec courtoisie et s'abstenir de grossièretés, quand bien même ses élèves usent d'un langage plus vulgaire
- un officier doit mener les hommes du rang par l'exemple.
Plus généralement, j'estime (et je ne suis pas le seul) que plus on monte dans la hiérarchie, les honneurs et les rémunérations, plus on a des devoirs.Par ailleurs, n'oubliez pas qu'un verbe trop haut peut avoir des conséquences diplomatiques... rappelez-vous le « ¿Por qué no te callas? » du roi d'Espagne !
Comparez l'expression de Nicolas Sarkozy avec celle de Raymond Poincaré, un siècle plus tôt. Certes, Poincaré lit un discours, et je ne prône pas une expression aussi maniérée... mais c'est autre chose que, par exemple, de s'adresser à des fonctionnaires (qui ne peuvent répliquer) en leur reprochant d'être là parce que c'est chauffé et qu'il y a de la lumière !
Pour le professeur de lycée, je confirme. ;-)
Belle analyse effectivement les discours varient suivant que l'on se trouve dans l'opposition ou la majorité. Donc il n'y a aucune conviction. Personnellement, je n'ai pas voté pour qu'un gouvernement de gauche passe en force en utilisant les mêmes arguments que la droite.
Pour votre espoir final, je pense que c'est raté. Si on veut que les choses bougent rapidement, il faut alors que le gouvernement ait les mains assez libres. On a le même système dans tous les pays centralisés: le cas anglais est le meilleur exemple. Ça a le mérite de l'efficacité: quand le gouvernement a le pouvoir de changer les choses juste en changeant la loi, il peut le faire et vite. Exemple de cela: les retraites, la loi sur le mariage.
Ce qui m'inquiète, plus que l'opposition qui se scandalise de ne pas être écoutée, c'est l'absence de raisonnement sur certains des sujets fétiches des divers camps. Actuellement, je dois bien dire que l'opposition raisonnée au mariage homosexuel n'est pas des plus audibles. Peut-être est-ce dû au fait qu'il n'y a pas vraiment d'arguments rationnels. Le gros problème que ce genre de discours pose, c'est qu'une fois au pouvoir, on n'a pas bossé, on est engoncé dans une idéologie. Et il est fort possible qu'on doive soit se renier soit faire de graves conneries.
L'exemple du reniement, c'est celui des retraites. Après avoir passé des années à dénoncer les politiques d'allongement de la durée du travail, le PS va faire pareil. Sans nous dire pourquoi, après avoir menti sur le fait qu'on pourrait financer les retraites avec le mode de calcul du moment en taxant le capital. Dans ces conditions, on voit mal pourquoi un gouvernement écouterait ses opposants: c'est de la pure obstruction, il y a 0 contenu applicable.
L'autre cas consiste à faire des conneries et à rester sur la même ligne. Exemple: encore une fois les retraites. Une des premières mesures de Hollande a été de dépenser plus sur les retraites, alors qu'il était déjà clair que le financement n'était pas assuré.
On pourrait penser qu'il suffise de dénoncer les mystificateurs pour ce qu'ils sont. Cela bute sur 2 écueils. Le premier, c'est qu'au final le public finisse par penser que les mystificateurs ont raison. Exemple: pleins de gens pensent que le gouvernement a dit que le nuage de Tchernobyl s'est arrêté à la frontière, sans doute la majorité de la population. Le deuxième, c'est que les mystificateurs descendront quand même dans la rue … et utiliseront tout le cinéma que vous décrivez. En quelques mots, la démocratie apaisée dans notre pays tient du mythe. Point positif toutefois: il y a très peu de meurtres en France et on ne se bat plus en duel.
Pour finir, le traité de Lisbonne n'est au fond que le plan B de Fabius. Il avait proposé qu'on n'adopte que les mesures institutionnelles et 2-3 bricoles, alors que tout ce qu'il dénonçait était déjà dans les traités. Il s'avère qu'à tort ou à raison, l'action de Fabius est considérée comme ayant fait basculer le scrutin. On a donc en quelque sorte adopté la position de l'électeur marginal. Je laisse à votre sagacité de savoir quels comportements ce genre de propositions favorise.
L'image de la lumière et du chauffage est d'autant plus malheureuse qu'il y a des chercheurs en France qui se trouvent précisément ne pas en avoir, de chauffage...
" La dignité de la fonction présidentielle implique une mesure de l'expression et un contrôle de soi que l'on ne saurait exiger d'un simple citoyen, surtout si celui-ci fait face à des difficultés. "
Et on pourrait attendre des média qu'ils précisent le contexte de la phrase du Président.
Cette phrase ne m'a pas du tout choqué. Je préfère ça à un coincé qui intériorise.
Par contre, le publicité faite à cette phrase (sans précision du contexte) m'a beaucoup dérangé. De même que le fameux "Vous en avez assez de cette « bande de racailles » ? Eh bien on va vous en débarrasser !". Ce qui est choquant n'est pas la phrase, mais le fait qu'elle n'ai pas été appliquée.
J'ai le sentiment d'un acharnement médiatique délirant contre un Président, pendant 5 ans, en rupture complète avec le sentiment du français moyen qui n'en a rien à fiche.
" mais c'est autre chose que, par exemple, de s'adresser à des fonctionnaires (qui ne peuvent répliquer) en leur reprochant d'être là parce que c'est chauffé et qu'il y a de la lumière ! "
Là c'est autre chose. Je trouve cette phrase est vraiment choquante, mais elle a beaucoup, beaucoup moins été reprise et commentée. C'est dans la tradition de la phrase la plus stupide de De Gaule sur les chercheurs.
Nicolas Sarkozy a provoqué et dépoussiéré un monde politique de droite sclérosé, hypnotisé par le FN, terrorisé à l'idée d'être qualifié de "raciste" "islamophobe" et autres niaiseries. C'est à mettre à son crédit. Mais il a aussi donné dans la provoc à deux ronds, comme cette phrase.
" alors que tout ce que Fabius dénonçait était déjà dans les traités. "
On peut avoir signé des traités commerciaux, et refuser catégoriquement de mettre le tampon "Traité constitutionnel" dessus.
" J'estime d'ailleurs que, de ce point de vue, François Hollande est d'une grande modération par rapport à son prédécesseur... "
Il parle moins. Mais ses Ministres parlent à sa place.
Les propos sur les exilés fiscaux ont été super dignes, à gauche et à droite.
@simple-touriste: Une chose qui me dérange, dans cette attitude de Nicolas Sarkozy, c'est l'inégalité de posture.
Je veux bien que deux individus aient une explication « franche », avec éventuellement un vocabulaire peu châtié. En revanche, j'aime moins quand l'un d'entre eux fait cela en étant protégé par un cordon de policiers prêts à embarquer / asperger de lacrymo / matraquer l'interlocuteur, et en pouvant au besoin poursuivre pour « offenses ».
C'est à cela que je faisais aussi allusion pour le cas du discours aux chercheurs : ceux-ci ne pouvaient pas répliquer...
C'est un principe élémentaire de bonne gouvernance que lorsqu'on est en position de dominant, on ne fait pas d'humour blessant et on réplique avec modération.
" C'est à cela que je faisais aussi allusion pour le cas du discours aux chercheurs : ceux-ci ne pouvaient pas répliquer... "
Oui, ce propos est du mépris pur. Il est remarquable qu'il n'ai pas été plus repris et commenté dans la presse généraliste.
" C'est un principe élémentaire de bonne gouvernance que lorsqu'on est en position de dominant, "
Ce qui est le cas pour le discours, mais certainement pas au salon de l'agriculture.
@simple-touriste: Un officiel en déplacement, entouré de nombreux policiers, et protégé par des lois spéciales (offense au chef de l'état), est en position de dominant.
L'offense au chef de l'état est substantiellement différente de l'injure publique?
Les policiers ont déjà arrêté quelqu'un qui envoyait paître un officiel en déplacement?
"Casse toi pauv'con" est typiquement une réponse de type mecs qui sont au même niveau! C'est l'attitude de quelqu'un qui n'a pas à ce moment là une position supérieure.
C'est ce qu'un mec répond à un autre mec. Le fait qu'un des deux soit Président n'est pas AMA très important à cet instant. C'est pas particulièrement glorieux, mais il n'y a vraiment pas de quoi en faire des tonnes. (Par contre afficher son mépris pour l'auditoire lors d'un discours, c'est inadmissible. Même pour rire, ça ne se fait pas.)
Par contre celui qui a dit "me touche pas" passe pour un héros dans certains milieux. S'il avait été contrôlé par la police, son prestige aurait été encore plus grand. S'il avait été mis en garde à vu, je pense qu'il aurait été sanctifié par la gauche de la gauche.
@simple-touriste: Oui, un quidam a justement été interpellé, poursuivi et condamné pour avoir brandi un panneau « casse-toi pauvre con » au passage de Nicolas Sarkozy.
C'est bien de cette asymétrie dont je parle :
Si l'incrimination d'« offense au chef de l'Etat » n'existait pas, les mêmes propos auraient poursuivi pour « injure publique (à un quidam) ». Je pense que par son comportement, Nicolas Sarkozy a remis la fonction présidentielle à un niveau normal, il l'a démystifié (le « Président au dessus des partis », c'est enfin fini!) et je trouve ça très bien. Ce qui justifie que l'on supprime l'« offense au chef de l'Etat » du droit. L'« injure publique » normale me parait bien suffisante.
« Un quidam refuse une poignée de main avec des paroles, certes blessantes, mais ne constituant pas clairement une injure publique. »
Donc « touche-moi pas tu m'salis » n'est pas une provocation excusant l'injure qui suit? Est-ce que quiconque a été condamné pour avoir répondu à des propos de ce genre?
« Un quidam renvoie au Président de la République ses propres paroles, et est condamné pour cela. »
Mais pas le même quidam. Si ça avait le type du salon de l'agriculture, d'accord. Mais le porteur de pancarte n'avait pas été personnellement pris à parti par Nicolas Sarkozy.
Il y a tellement de choses critiquables dans l'exercice du pouvoir par Sarkozy, pourquoi ressasser cette expression d'agacement...
> l'analyse d'Alain Minc expliquant doctement « Le faible écart avec M. Hollande montre que la France n'est pas de gauche
Je pense qu'il a raison. La victoire de la gauche n'est pas glorieuse. Les boules puantes de Médiapart non plus.
> « Celle-ci ne peut gagner que par effraction »
Profiter d'une opportunité qui arrive par hasard, ce n'est pas une effraction, c'est de l'opportunisme.
Je ne vois pas ce que le terme « effraction » vient faire ici! Alain Minc ne maîtriserait pas le vocabulaire français? Allons bon...
@simple touriste : La France a voté a environ 35 millions de voix sur 46 millions d'inscrits soit pour Hollande, soit pour Sarkozy. Il est donc clair que la France n'est pas de gauche.
Par ailleurs, une provocation n'excuse pas l'injure qui vient en retour, elle n'est qu'une circonstance atténuante. De toute façon, on attend de la dignité du plus haut représentant de l'état, car un représentant qui se comporte de manière indigne met mal à l'aise tous ceux qu'il représente.
Je vous rejoins néanmoins sur le fait que son discours aux chercheurs, dans la série mauvais exercice du pouvoir, était bien plus grave que cette altercation.
@kuk
Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse :
Article 29 :
Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure.
Article 33 :
L'injure commise de la même manière envers les particuliers, lorsqu'elle n'aura pas été précédée de provocations, sera punie d'une amende de 12 000 euros.
Concernant l'excuse de provocation, d'après http://www.e-juristes.org/l-injure-... :
Exonération : l’excuse de provocation On pourra cependant s’exonérer en réclamant l’application du cadre légal de l’excuse de provocation, susceptible d’expliquer l’injure (article 33 de la loi sur la presse). La jurisprudence reconnaît et définit en effet la notion de provocation comme un « fait accompli volontairement pour la personne injuriée, de nature à expliquer l’injure ».
@Elfe: Je ne sais pas s'il s'agit d'une différence de discours ou de perception ; autrement dit, je ne sais pas si cette attitude est sincère ou s'il s'agit juste d'une posture (probablement que chez une partie des militants, il y a croyance sincère, et chez les dirigeants plutôt hypocrisie et manipulation).
Les militants (de toute obédience qu'ils soient) me donnent souvent l'impression qu'ils subordonnent le fonctionnement de l'ensemble de la société à la cause qu'ils défendent, tant juste ils estiment celle-ci. Si des personnes de leur « camp » commettent des infractions, celles-ci sont négligeables en volume, ou du moins proportionnées aux maux qu'ils souhaitent prévenir (la « manif pour tous » ne prétend rien que moins qu'éviter la destruction de notre société, les écologistes celle de l'humanité) ; en revanche, les autres camps sont « excessifs ».
@Simple-touriste: En effet. Cela ne sied tout simplement pas à un dirigeant (quel que soit son domaine d'activité) que de mépriser ouvertement son auditoire, et plus généralement d'afficher son mépris envers certaines catégories de personnels. Il me semble avoir vu l'autre jour un message sur un afficheur à l'École polytechnique : « On ne dirige que par l'exemplarité. »...
Cela dénote par ailleurs le manque de fair-play. Il y a en effet une certaine lâcheté à provoquer des gens en sachant très bien qu'ils ne pourront pas répliquer. Ceci dit, il semble que c'est ainsi que procèdent divers animateurs et journalistes : quand on est à la fois celui qui polémique et celui qui peut couper le micro ou sélectionner ce que l'on va rapporter, on a des facilités à avoir le dessus !
@David Monniaux: Sous Sarkozy, on est embarqué pour une pencarte "casse-toi pauvre con", et sous Hollande, on est emabrqué pour... On ne sait (cf le déplacement à Dijon).
Mais c'est vrai que ça a beaucoup moins fait jaser dans la bonne presse bien pensante.
@Nono: L'exercice habituel du pouvoir.
Comme mettre les gyrophares et circuler à grande vitesse quand on est ministre et qu'on se rend à un déplacement non crucial.
Je trouve cela sain que la France "conservatrice" ou "réactionnaire" s'exprime en occupant la rue. La gauche n'a pas le monopole de la contestation. Ce qui est consternant en revanche, c'est que cette France-là ne soit capable que de se mobiliser sur des sujets aussi anodins que le "mariage pour tous" dans un climat économique et social délétère.
@DC
La "droite" a t-elle la moindre conviction?
Quelque chose sur lequel elle pourrait se mobiliser?
Il y a de nobles causes sociales à défendre contre la gauche, mais je doute que la "droite" les défendent. Elle a eu le pouvoir, et on a vu...